vendredi 24 mars 2017

Leif Vollebekk – Twin Solitude #leifvollebekk



Attention découverte. Je remercie d’ailleurs les inrocks d’avoir fait un article dessus pour me permettre de découvrir cet artiste canadien. Je vous préviens de suite, ça va être dur à trouver : un soundcloud et c’est presque tout. Pas disponible en streaming sur les sites habituels… Je cherche toujours un moyen de me procurer le vinyle d’ailleurs !
Twin Solitude est un album plutôt calme et nous emmène vers de belles balades, en douceur, en délicatesse. Dire que c’est du folk serait terriblement réducteur, il y a aussi des notes de pop avec piano (façon Tobias Jesso Jr), un peu de country et de l’americana (l’ombre de Neil Young) mais surtout de la soul, notamment grâce à la voix chaude et habitée de Leif. Ce mélange fait penser d’ailleurs à Jeff Buckley.
En tout cas, il y a de l’émotion et de l’authenticité.
La production n’est pas en reste même si elle n’est pas luxuriante, on a bien pris gare à ne pas en mettre trop, l’album reste épuré, pas trop chargé.

Bref, un album délicat et fin, sorti de nulle part et déjà très présent, à classer à côté d’Avi Buffalo, Tobias Jesso Jr, Max Jury, et pas loin du Dieu Elliott ; à découvrir absolument.



vendredi 17 mars 2017

Inna de Yard – The Soul Of Jamaica #innadeyard



C’est un fait, le reggae jamaïcain est moribond. Cela fait maintenant 20 ans (avant internet !), on a essayé (surtout en France) d’exhumer le répertoire historique de l’ile, façon Buena Vista Social Club à dreadlocks. On avait été chercher Stanley Beckford de sa misérable retraite pour le faire tourner entre Chauvigny, Pouziou la Jarie et Sorreze, reproduit Toots et lui permettre d’enregistrer avec Clapton, Ben Harper ou Manu Chao, fait un peu de pub aux Stakhanovistes des Gladiator, usé jusqu’à la moelle le contrebassiste des Skatalites, fondé le Jamaican All Stars avec les survivants de la vague 70’s, on avait surtout imité de toutes part le roots reggae dans un anglais approximatif des « hou yeah » trop présents et des « jah rastafari » poussés du fin fond de la Vendée. Et puis plus rien, le reggae s’en est allé avec l’arrivée d’internet, des jeans slim et du revival rock. Il reste encore un peu présent là où la nature et la nonchalance le nécessitent : dans les iles, de la Polynésie aux Antilles, de Bali à la Nouvelle Calédonie. La Nouvelle Zélande se l’est même du coup approprié, sans même le demander.
Il ne reste donc pour les amoureux du skank et du one drop que les yeux pour pleurer et les compiles Trojan (en pleine réédition) pour écouter en boucle les enregistrements d’époque fortement altérés par des conditions de production et de stockage d’un autre âge.
Mais voilà qu’arrive, en 2017, un album complètement anachronique, sorti surement 15 ans trop tard : Sound Of Jamaica de Inna de Yard. Un collectif de vieux routard de l’ile qui avait déjà sévi à l’époque.
Rien de neuf, juste un nouveau témoignage sur ces oubliés de l’ile, trop petits derrière l’ombre géante de Bob Marley.
Le principe d’Inna De Yard est de proposer une musique de rue, telle que jouée entre les prises, dans les yards (les cours) à l’entrée des studios. Plus authentique donc, plus acoustique. Sur une rythmique souvent Nyabingui (chant de prière rasta sur fond de percussions africaines tribales, popularisé dans les 70’s par Ras Michael) s’exercent quelques jeunots mais surtout les voix de vieilles gloires jamaïcaines comme le fabuleux Ken Boothe, soulman de l’ère rocksteady, comme les Viceroys (et leurs somptueuses harmonies vocales), comme Winston McAnuff ou comme le leader des Congos. Du Roots Reggae donc, du vrai.
Bon remède pour les allergiques au one drop, sa batterie minimaliste, au skank trop appuyé (célèbre clavier et guitare ensemble) de la fin des 70’s ou du dub, la production minimaliste laisse la part belle aux mélodies et aux voix. 
Pour les amoureux de Redemption Song donc. 
Cela ne veut pas dire que tout est acoustique, on y trouve aussi des basses rondes qui tiennent la mélodie, des cuivres (un excellent trombone qui ravive les souvenirs de Don Drumond), une guitare électrique, du reggae quoi.
The Soul of Jamaica, le titre n’est pas trompeur, il y a de la soul, de la mélancolie, des belles voix (Love Is The Key, Let The Water Run Dry, Youthman et ses chœurs masculins très Gladiators), mais aussi une pointe de ragga en mode mineur (le flow de Sign of the Time et ses montées bien senties).
Pour les amoureux du reggae, ceux qui veulent se sentir en vacances, ceux qui cherchent un angle d’attaque pour aborder cette musique, sautez sur ce disque. Bien produit, original par son attaque et diablement attachant. On devra encore attendre 10 ans pour avoir la suite ?

Frank Ocean – Blond(e) #frankocean



Il y a des albums qu’on ne voit pas venir, qu’on se dit qu’on n’écoutera pas, que “ce n’est pas pour moi, ce n’est pas mon style”. 

Et pourtant.

Ça a été le cas de Blond(e) le dernier album de Franck Ocean. Ce n’est bien sûr pas un nouvel album, tout le monde l’a encensé comme il faut à sa sortie, classé dans les meilleurs albums pop de l’année et tout. Mais bon c’est du RnB, du Rap, ya un vocoder, donc je n’y ai même pas prêté une oreille à sa sortie. Jusqu’à ce début de 2017.

Grave erreur tant cet album est bon. Ok c’est du Hip Hop, du RnB, des musiques urbaines, appelez ça comme vous voulez, mais c’est vraiment très intéressant, très pop et très mélodique (ce que je reproche au Hip Hop généralement). C’est aussi bourré de vrais instruments et surtout de beaucoup d’émotion. Comment ne pas chavirer à l’écoute des balades Ivy ou de Self Control?

En plus d’enchainer les titres attachants : Nikes, Ivy, Solo, Self Control, White Ferrari ou Pink & White, l’album est assez cohérent, aéré avec ses pistes plus contemplatives, d’ambiance et un final plus dans la ballade soul (Siegfried, Godspeed).

Je vais avoir du mal à caractériser cet album tant ce n’est pas ma « came » habituelle donc je vais faire court : Blond(e) est un très grand album, Frank Ocean est un artiste indispensable qui fait du bien à la pop moderne.


jeudi 16 mars 2017

The Shins – Heartworms #theshins




Cela faisait longtemps qu’on n’avait pas eu de nouvelles de James Mercer (le leader devenu seul membre des Shins), 3 ans depuis la sortie du dernier Broken Bells avec Danger Mousse et 5 ans depuis le dernier Shins. Et bien on peut dire que rien ne change vraiment pour lui. Le son reste sensiblement le même que sur les albums précédents, avec peut-être même un rapprochement de Chutes Too Narrow, sorti il y a 14 ans… Bien sûr il y a quelques sons électro par-ci par-là qui viennent hanter le tout (Cherry Hearts) mais cela reste principalement de la pop à guitare classique avec une voix haut perchée, des harmonies vocales, un peu de folk, un peu de power pop et une pincée de britpop pour la délicatesse. Bref, voici la dose de Shins du moment.

L’album en entier est plutôt agréable (à l’exception de Painting A Hole que je trouve plus moyenne avec cette rythmique qui me fait penser à Arcade Fire) même s’il ne révolutionne rien.
J’aime beaucoup Mildenhall une ballade que je qualifierai d’électro country (parfait), Heartworms superbe, Rubber Ballz, Half a Million plus classique et la plus laid back Dead Alive. J’aime bien aussi So Now What mais ce n’est pas une nouveauté : ce titre était déjà sorti il y a 3 ans pour la BO de Wish I Was Here (Le Rôle de Ma Vie en VF) du copain Zack Braff (qui avait propulsé the Shins avec Garden State).

Ce qu’on peut dire c’est que James Mercer est un sacré song writer qui sait écrire des chansons plaisantes qui restent en tête, Rubber Ballz, Half A Million, Name For You, Dead Alive en sont de parfaits exemples et proposent vraiment de la power pop de qualité. Ancrée dans les 00’s (l’écoute de Heartworms fait rajeunir, je vous assure !), mais de qualité. On repense à tous ces concurrents tombés au champ d’honneur, aux Death Cab For Cutie un peu moribonds, à Brendan Benson et promis je ne parlerai pas de Coldplay…

James Mercer nous propose un album refuge, où rien n’a bougé ou presque, plus homogène et globalement meilleur que Port of Morrow, le dernier opus (même si le titre Port of Morrow reste pour moi un des meilleurs morceaux des Shins avec New Slang et Saint Simon). Heartworms est écrit par quelqu’un qui n’a rien à prouver, rien à inventer. N’empêche, c’est quand même très bien fait tout ça !
 

François & The Atlas Mountains – Solide Mirage #francoisandtheatlasmountains



François and The Atlas Mountains nous revient cette année avec un album plus world, plus africain, plus politique et dans l’air du temps sur fond de crise des migrants. On se rapproche plus de E Volo Love que de Piano Ombre donc. Les textes sont plutôt poétiques (abscons diront certains) mais ne manquent pas de quelques durs retours à la réalité comme sur Apocalypse à Ipsos qui derrière une douceur de premier abord reste assez amère.

Musicalement c’est très réussi, les guitares africanisantes se marient à merveille avec la rythmique syncopée (évidemment) et la voix de François au phrasé si particulier et arythmique. Le tout est magnifiquement produit, comme par exemple la collaboration d’Owen Pallett sur 1982 qui apporte des arrangements tout en cordes qui magnifient la chanson.

On note que de très peu nombreuses baisses de régime comme les Pi Piou de 100 000, un peu en dessous, ou le punk rock un peu dissonant de Bête Morcelée. Sinon le reste est parfait, langoureux, invitant au voyage, à la mélancolie et la lumière.

Apocalypse à Ipsos, 1982 toutes deux géniales restent pour moi les sommets de l’album, mais pleins d’autres titres ne sont pas en reste : l’exotisme synthétique d’Âpres Après est super, le single dansant Grand Dérèglement, Jamais 2 Pareil ou Tendre Est l’Âme sortent aussi du lot.

Pour résumer, un album bien sympathique, realise avec finesse, qui fait vraiment du bien.

On espère maintenant que François et sa troupe passeront à Toulouse pour nous proposer un concert aussi dantesque que la dernière fois où on les a vus dans la petite salle du connexion (chronique sur ce blog).
 

mardi 14 mars 2017

Foxygen – Hang #foxygen


Foxygen ont repris en 2013 le créneau laissé libre par MGMT suite à une retenue médiatique du duo qui avait inventé la pop rétro-futuriste. Forçant plus le créneau Rolling Stones que Beatles, il avait proposé un très bon premier album synthèse de ce qu’on peut faire avec du vieux dans de nouvelles gamelles. Mais voilà, on pensait les Foxygen perdus dans les nimbes après un deuxième album déraisonnable, décousu, trop gros et trop expérimental (mais avec quand même quelques bons trucs dedans). Après également une suite d’annulations de concerts et de faits divers dans les hôtels du monde entier dignes d’une tournée des Stones ou de Led Zep. Cramés pensait-on. L’annonce d’un nouvel album ne m’avait que moyennement intéressé. Bon aller, on se force un peu. La première écoute est bizarre, L’album est ultra produit, grandiloquent, théâtral, imprégné de music-hall, de cuivres pompiers, de cordes. On se demande si c’est bien Foxygen, ce n’est plus du tout low fi, légèrement branleur, c’est plus pro. Mais au final on reconnait la patte Foxygen, cette voix nonchalante, cette touche de folie dans les changements rythmiques et mélodiques. Très vite aussi on se rend à l’évidence : Foxygen sonne comme du Lemon Twigs. Comme c’est Jonathan Rado de Foxygen qui a produit Do Hollywood, l’album sensation de la fin d’année dernière, on est en droit de se demander si l’élève n’a pas déteint sur le professeur. Et si c’était plutôt le contraire ? Et qu’en fait la production des Lemon Twigs était un entrainement pour Hang ? Et si c’était Jonathan Rado qui avait changé le son des Lemon Twigs avec ce qu’il avait déjà en tête ?
Sortons de ces considérations pas forcément objectives et concentrons-nous sur l’album, qui demande du débroussaillage pour entrer dedans. Car oui l’album est ultra riche : le music-hall, les crooners, Broadway, le psychédélisme west coast, la pop baroque, la soul, un brin de classique, des cordes à la Burt Bacchara, tout cohabite et se chamaille dans les 8 titres de l’album. Mais toujours avec la touche « Foxygen », cette voix déglinguée et crâneuse, très stonienne.
Certains vont adorer, d’autre détester, je suis pour ma part un peu circonspect, comme pour Lemon Twigs d’ailleurs : c’est bien, c’est original tout en restant très référencé, c’est plaisant et dérangeant, mais ça ne me fait pas chavirer.
A vous de vous faire votre propre opinion.
 
 

Electric Guest – Plural #electricguest



Cela faisait longtemps qu’on n’avait pas eu de nouvelles d’Electric Guest, la sensation de 2012. On les retrouve donc dans l’exercice très périlleux du deuxième album. Pour éviter de se répéter sans doute, ils ont décidé de s’écarter de la production Danger Mouse, vraie patte du précédent album. On s’oriente vers une pop plus classique (avec appuis électro et 80’s de rigueur) qui lorgne donc vers du Metronomy. On s’oriente aussi vers une composition plus soul.
A la première écoute, on est un peu déconcerté par l’absence de parti pris et la légèreté et la douceur de l’ensemble. Enfin si, en filigrane, le parti pris est plus d’aller vers Michael Jackson ou Prince, mais juste sur le geste.
Même s’il est moins tubesque et immédiat que le précédent opus, on y trouve pas mal de titres qui restent en tête. D’abord le super Back For Me, plus proche de l’album précédent, mais aussi Dear To Me, un peu cheezy, qui flirt avec le kitch sans jamais y sombrer, Back & Fourth plutôt RnB, Glorious Warrior, qui reprend le gimmick de Dear To Me en plus synthétique, See The Light plutôt planante et sympa. Et plus faiblement on trouve Oh Devil plus reggae et une rythmique RnB 2000 (genre Kelis) ou My Omen dans un style très Foster The People (sans dénigrer !).
Bref la nouvelle production brouille un peu les pistes et laisse supposer que Danger Mouse faisait partie du groupe et l’a quitté. En se défaisant de cette emprise, Electric Guest signe un album moins marqué, plus mainstream peut être mais toujours « feel good », avec ce qu’il faut de tubes mais bizarrement sans prétention. Et c’est sûrement ce qui me plait le plus.
Du coup il risque de moins marcher que le précédent.
 
 
 

Bon Iver, retour d’expérience #boniver


J’écris parfois un peu trop vite mes chroniques. Certains albums ont besoin de s’infuser longuement, et c’est le cas pour moi du dernier Bon Iver. J’ai commencé par n’aimer que partiellement l’album, ne comprenant pas certains titres, ne faisant pas l’effort de rentrer dedans. Cela a d’ailleurs valu une discussion très intéressante avec d’autres bloggers musicaux. Je vous conseille d’ailleurs d’aller voir leur page : La pop d’Alexandre et Etienne.

Alors que maintenant, 4 mois après sa sortie, je suis persuadé que cet album est un chef d’œuvre et que son créateur est un génie.
L’album, mais plus encore le tournant qu’a opéré Justin Vernon avec cet album est important. Je vous conseille de regarder la vidéo de concert en lien à la fin du post pour vous faire une idée de ses prestations live d’un nouveau genre. En plus de donner vie à ses lubies de studio, Justin Vernon change ses chansons entre les différents concerts, repense les anciens titres à la sauce du dernier album. Les prestations sont totales, l’engagement émotionnel complet.
Bref, Justin Vernon est un génie, tous les bidouillages électroniques sont essentiels à son œuvre, derrière le vocoder l’émotion est toujours palpable. Et je vous conseille très fortement d’insister avec cet album. La lumière est au bout du couloir !